Cody. Rien de néfaste peut arriver à cet instant. J’enroule mes bras autour de Scarlett, cette protection impossible à défaire. Elle est là. Sa présence m’est indispensable. Notre seul ennemi demeure l’astre lunaire. Battu à cet instant grâce aux rideaux tirés dans la pièce. Nous n’avons pas eu le courage de descendre les stores. Les cycles du sommeil me semblent si passionnants. Tout peut se passer grâce à l’imagination. Rassasier nos plus profonds désirs, comme affronter nos plus grandes craintes. Cependant, cette matinée-là, je contemple ma belle entrain de dormir. Elle est près de moi. Sa respiration m’apaise. J’hume cette odeur de vanille qui lui colle à la peau. Quand nous pouvons, j’essaie de la rejoindre dans sa chambre. Sa fenêtre n’a plus de secret. La main caresse sa joue, essayant de ne pas la perturber dans son rêve. Soudain, elle bouge, je m’en veux. « Dors mon ange, il reste trois heures avant d’aller en cours. » Son visage se tourne vers le mien. Elle est magnifique sous cette mine. Scar m’embrasse malgré ses yeux qui ne trouvent pas le courage de s’ouvrir. Un léger rire avant qu’elle se blottisse de nouveau dans mes bras.

Cody. La nuit a été très courte. Mon père a téléphoné à mon oncle pour qu’il puisse m’héberger à San Diego avant de m’inscrire dans un nouveau lycée. Je ne le désire pas mais, mon avis ne compte plus dans cette maison. Scarlett est enceinte et le réflexe des parents est de m’éloigner. Aucun membre de cette famille demeure brave et j’en fais parti. J’ai tenté de tenir tête et la récompense a été des coups. Je ne l’avais jamais vu aussi en colère avant cette nuit-là. Pourtant, c’est un homme jamais satisfait. Enfermé dans la chambre, j’ai essayé de sortir par la fenêtre mais, les parents ne sont pas aveugles, et ont surveillé ma fenêtre toute la nuit. Coincé. L’avion décolle pour huit heures du matin. Avant mon départ de la demeure Barnes, j’embrasse mes frères une dernière fois, ainsi que ma mère malgré ce qu’elle me fait enduré. « Est-ce que tu pourrais au moins donner ceci à Scarlett, s’il te plait ? » Je lui tend une lettre, écrite après la dispute. « Très bien. » Elle est réticente, je le vois parfaitement dans ses yeux. Je n’ai rien à perdre de tenter le tout pour le tout. Unique possibilité. Malheureusement, la lettre ne tombera jamais dans ses mains..

Ma très chère Scarlett,
Je n’aurais jamais cru t’avouer ceci dans une lettre. La lâcheté est le mot qui résume ces prochaines phrases. Je pars demain pour la Californie.. Je t’avais pourtant dit qu’on trouverait une solution ensemble. Je regrette tellement de te laisser dans cette situation. Tu ne le mérites pas.. Je ne reviendrai pas à Cody avant mes dix-huit ans, après le lycée. Sache que cette décision n’est pas la mienne. Je te laisse la nouvelle adresse sur le verso, si tu veux m’écrire.

Aidan, celui qui t’aime et t’aimerai pour toujours.


San Diego. Les examens approchent à grand pas et je ne me sens pas du tout prêt. En réalité, je le suis jamais. Mes résultats demeurent raisonnables, sans être extraordinaires. La moyenne de douze depuis le collège et cela me semble déjà conforme. « Viens, on part ! » Je regarde mon ami, ne comprenant pas le sens de sa phrase. « Boire un verre ? » Nous venons de passer plus de trois heures à la bibliothèque universitaire.. la pause semble méritée. « Non. On lâche. » Il a l’air sincère, voilà ce qui me fait peur. Jake m’a rejoint à San Diego après la fin du lycée à Cody. Il n’a pas apprécié l’idée que je puisse partir comme un voleur. Cela ne me représente pas d’après lui. Nous sommes quand même restés en contact et San Diego l’a attiré quand je lui racontais cette vie hors norme. « T’es trop con. » Dis-je avant de retourner dans mon ouvrage. « Réfléchis un peu ! Je le vois que tu n’es pas heureux. Franchement, tu t’imagines pendant cinquante ans avec des dossiers, derrière un bureau ? C’est pas toi ça. Puis moi.. franchement j’suis pas fait pour ça. » Jake oublie que nous sommes dans un lieu où nous devons parler à voix basse. Une employée n’hésite pas à nous signaler de baisser un ton. « On n’a pas assez d’argent.. on vivra comment.. » Oui, je suis prudent, un peu trop depuis la grossesse de Scarlett. L’invincibilité n’existe pas. « On avisera ! Mec, je veux pas vivre ainsi et toi non plus. » La détermination se lit dans son regard. Et pourtant, je vais entrer dans son jeu malgré les dires de ma famille. Pour la première fois de mon existence, l’avis des Barnes est secondaire.


Alaska. L’aventure commence sur les traces de Jack London. Avec Jake, nous voulons mêler nos rêves. Malgré l’abandon des études, nous avons quelques connaissances littéraires et souhaitons vivre ces scènes mythiques. « Le jeu est fermé pour ce soir. » Déclare le croupier. Un homme souhaite parier mille dollars après avoir perdu deux fois de suite contre nous. Jake ne désire pas passer à côté de cette opportunité. Les poches avaient déjà besoin d’être remplies. « Très bien. » Je m’installe de nouveau à la table, regardant mon compagnon de route avec un air craintif. Je n’apprécie pas jouer l’argent ainsi, trop prudent, trop économe. Tout le contraire de Jake. Le jeu ne débute pas à notre faveur. « Allez, écrasez-vous ! » Dit l’inconnu pour essayer de nous déstabiliser.  Il place immédiatement trente jetons sur le zéro.. Il gagne. « On continue ! Nous avons dix mille dollars en banque. Allons-y ? » Crie Jake pour allécher la curiosité du joueur. C’est tout ce que nous avons pour note première année ! « Tu es fou ! » m’exclame-je face à cette situation troublante. « Fais-moi confiance. » Plusieurs secondes à le regarder dans les yeux. Il sait comment monter ma tension. Je ne désire pas voir cette partie. « Vas-y. » Avoue-je avant de me lever de la chaise pour aller m’asseoir au bar. Cela serait peut-être la dernière bière avant plusieurs jours. Aucun regard sur la table de jeu. Je préfère observer les différentes marques de boissons alcoolisées. « Ouais ! Aidaaaaan ! » Soudain, le miracle se produit. Notre périple commence grâce à la chance.